La farce de Maître Pathelin : Historique, intrigue, contexte

La farce de Maître Pathelin :
Historique, intrigue, contexte

La farce était à l’origine une petite pièce incorporée à un spectacle religieux pour détendre le spectateur. Conçue comme un intermède autonome, elle a pu ainsi se développer comme genre dramatique à part entière.

La farce était jouée partout, la plupart du temps en plein air, sur une place du marché, à un carrefour, dans une cour d’hôtel, dans les fossés de la ville… Une scène, à l’époque, se réduit à des planches posées sur des tréteaux. Le fond est fermé par un rideau qui cache une coulisse exiguë. Pas de décor, juste quelques accessoires. Les spectateurs sont debout, sur trois côtés. Ils manifestent intensément, préviennent les personnages des mauvais coups qui se préparent et tentent d’intervenir pendant la représentation si bien que les comédiens doivent prendre bien soin de remonter l’échelle pour éviter que le public n’envahisse les planches !

La farce se joue lors des jours gras (qui précédaient le carême), des jours de foire, des fêtes locales, des événements politiques heureux ou de certains mariages. Les comédiens, du moins au début, viennent de milieux déjà initiés à l’art dramatique : les clercs et les escholiers de l’Université.

L’origine de la farce semble picarde. Au début du XIVe, sous le règne de Philippe IV le Bel, on assiste à un développement exceptionnel des villes du Nord. L’aisance financière et une certaine liberté amènent à la naissance du théâtre profane. Notons que le théâtre médiéval n’est pas un renouvellement du théâtre antique, que ce dernier n’a eu aucune influence sur lui. Au Moyen-âge, les Français ignoraient tout des comédies grecques.

Au Moyen-âge, les divertissements sont peu nombreux et peu variés. Rappelons qu’au XIVe, les famines, la peste noire et la guerre de Cent ans ont occis la moitié de la population française. Même le recours à l’Espérance ne fonctionne plus. La farce devient le spectacle par excellence pour se distraire d’une vie quotidienne à la fois difficile et monotone. Elle a le bonheur de plaire à toutes les classes sociales. Le spectateur médiéval désire avant tout rire à gorge déployée. Il n’est pas exigeant. La délicatesse des sentiments, l’expression artistique, la vérité des caractères, la cohérence des situations lui importent peu. La farce ne veut ni édifier ni instruire. Elle est uniquement destinée à faire rire.

Un peu plus de deux cents farces sont parvenues jusqu’à notre époque, ce qui n’est pas beaucoup. Elles proviennent principalement de quatre recueils qui ont réussi à traverser les âges : le recueil du British Museum, le recueil Trepperel, le recueil Cohen, le recueil La Vallière. Tous datent du XVIe. Si les auteurs des farces sont le plus souvent anonymes, c’est d’abord que la propriété littéraire n’existait pas au Moyen-âge. Un auteur s’emparait d’une farce existante et l’allongeait ou la resserrait à son gré… La grande vogue de la farce se situe entre 1460 et 1560. A partir du milieu du XVIIe, elle commença à être trouvée vulgaire et le genre disparut progressivement.


L’intrigue

Avocat sans le sou mais peu scrupuleux, Maître Pathelin s’est mis au défi de ramener du drap du marché.
A force de flatteries et d’entourloupes, il parvient à berner un marchand pourtant réputé pour sa dureté en affaires et son refus de faire crédit.
Ayant fermé sa boutique, le drapier se rend chez Maître Pathelin pour se faire payer et manger une oie comme promis. Seulement, une surprise l’attend !...
Aidé par sa femme Guillemette, Maître Pathelin a monté un scénario osé : Malade depuis onze semaines, comment aurait-il pu se trouver au marché ? S’ensuit une scène hilarante où il joue les fous et s’amuse à baragouiner dans des tas de langages totalement inventés ! Tout le monde tient si bien son rôle que le drapier finit par s’en aller sans avoir obtenu ses écus.
Le berger qui garde les moutons du drapier est convoqué au tribunal pour en avoir assommé plusieurs. Il a choisi Maître Pathelin comme avocat. Pensant le berger facile à duper, ce dernier a accepté de la défendre.
Quelle n’est pas la stupéfaction du drapier de découvrir que l’avocat de son coquin de berger est l’homme qu’il pensait être à l’article de la mort ! Même stupéfaction pour Maître Pathelin, confronté subitement au marchand qu’il vient de rouler le matin même !
Avec beaucoup d’astuce et de rouerie, Maître Pathelin embrouille finalement le drapier qui se voit débouté de sa plainte et renvoyé sèchement par le juge.
Au moment de faire payer, notre avocat est à son tour mystifié par le berger, pas si bête que ça somme toute…


La Farce de Maître Pathelin

Chef d’œuvre du théâtre médiéval, La farce de Maître Pathelin est trois fois plus longue que toutes les autres farces qui nous sont parvenues.

L’auteur est resté jusqu’à ce jour inconnu et tous les efforts déployés pour percer à jour son identité ont été vains. La pièce a connu un extraordinaire succès en étant rééditée pas moins de 25 fois jusqu’à la fin du XVIe !

Dès 1538, "Pathelin" entre dans la langue française pour désigner celui qui, par de faux semblants et belles paroles, parvient à duper les gens pour parvenir à ses fins. Rabelais emploiera le mot "patelineur" en 1546 et qui se souvient aujourd’hui que l’expression "Revenons à nos moutons" est tirée d’une des répliques du Juge de cette farce du XVe siècle à tout point de vue exceptionnelle !

Traduction, adaptation et mise en scène
Patrick Maruta

La distribution

Maître Pathelin Patrick Bouchez
La Drapière Kathy Lacroix
Guillemette Margaux Bertrand
La servante Claudia Volpé
La mère Émilienne Poulet
La bergère Angéline Soissons
Catherine Bouchez
Le juge Rose-Ange Canevat
La greffière Valérie Pélini
Nadia Soissons

Fac-similé de la Farce de Maître Pathelin

Fac-similé de la Farce de Maître Pathelin

Bien qu’il ne soit pas fait mention du nom de l’éditeur dans cet ouvrage de la Farce de Maître Pathelin, les caractères facilement reconnaissables, permettent de l’attribuer de façon quasi certaine au Lyonnais originaire de Liège Guillaume Le Roy, en 1485 ou 1486.